Les inégalités de genre persistent au travail
- FA-FPT CeA
- 3 févr.
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Dernière mise à jour : 4 févr.

Le rapport de la Cour des comptes intitulé « Les inégalités entre les femmes et les hommes, de l’école au marché du travail », publié le 27 janvier 2025, met en évidence un paradoxe persistant : bien que les femmes soient en moyenne plus diplômées que les hommes, elles accèdent moins fréquemment aux postes et métiers les plus valorisés et rémunérateurs.
Des inégalités de genre accrues à l’entrée sur le marché du travail et tout au long de la carrière
L’entrée dans la vie active marque un tournant décisif dans le creusement des écarts entre les femmes et les hommes. Alors que les jeunes femmes sont en moyenne plus diplômées que les hommes, elles rencontrent davantage d’obstacles dans leur insertion professionnelle et leur progression de carrière.
1. Une insertion plus difficile et une précarité plus forte
Dès leur premier emploi, les femmes sont davantage confrontées à des situations précaires. Elles sont plus souvent embauchées en contrat à durée déterminée (CDD) ou en intérim, avec moins d’accès aux emplois stables à durée indéterminée (CDI). Plusieurs facteurs expliquent cette situation :
Des choix d’orientation aux conséquences durables : Les secteurs où les femmes sont majoritaires, comme l’éducation, le social ou la santé, offrent souvent des contrats plus précaires, notamment en début de carrière (vacations, CDD, stages prolongés). À l’inverse, les domaines d’ingénierie ou de la finance, où les hommes sont surreprésentés, permettent un accès plus rapide à des CDI et à des évolutions salariales.
Une plus grande difficulté à négocier les conditions d’embauche : Les études montrent que les femmes négocient moins fréquemment leur premier salaire, ce qui contribue dès le départ à un écart de rémunération avec leurs collègues masculins.
Un accès plus restreint aux réseaux professionnels : Les hommes bénéficient souvent d’un réseau plus étendu et d’un capital social qui facilite leur recrutement, notamment pour les postes les plus stratégiques.
2. Un écart salarial persistant et peu justifié
L’un des constats majeurs du rapport est que, malgré des qualifications comparables, les femmes gagnent en moyenne 16 % de moins que les hommes en salaire brut et cet écart monte à 28 % sur l’ensemble de la carrière.
Les principales causes de cet écart :
Des métiers moins rémunérés : Les femmes sont davantage présentes dans des secteurs où les salaires sont structurellement plus bas. Par exemple, une infirmière ou une éducatrice spécialisée perçoit un revenu bien inférieur à celui d’un ingénieur ou d’un informaticien, alors que les niveaux de qualification peuvent être similaires.
Un accès restreint aux postes à responsabilité : Même lorsqu’elles sont présentes dans des secteurs porteurs, elles accèdent plus difficilement aux fonctions de direction ou aux métiers à haute valeur ajoutée. Moins de 20 % des postes de direction d’entreprise sont occupés par des femmes en France.
Moins de primes et d’avantages : Une part significative de l’écart salarial provient des primes, bonus et rémunérations variables, dont les hommes bénéficient davantage, notamment dans les métiers commerciaux et financiers.
Un moindre pouvoir de négociation : Plusieurs études montrent que les hommes osent plus facilement demander une augmentation, ce qui contribue à élargir l’écart au fil des années.
3. Le plafond de verre et les freins à l’évolution de carrière
L’un des phénomènes les plus marquants du marché du travail est le plafond de verre, c’est-à-dire l’ensemble des obstacles invisibles qui empêchent les femmes d’accéder aux plus hauts niveaux de responsabilité:
Les freins principaux :
Des stéréotypes persistants : De nombreux employeurs considèrent encore que les postes à haute responsabilité impliquent une disponibilité totale, ce qui pénalise les femmes, souvent perçues comme moins « engagées » en raison de leurs obligations familiales.
Le manque de mentorat et de modèles féminins : Dans certains secteurs comme la finance, la tech ou l’ingénierie, les figures de leadership sont très majoritairement masculines, ce qui freine l’ascension des femmes.
Des biais dans les promotions internes : Les hommes sont plus souvent identifiés comme « à potentiel » et bénéficient d’opportunités de progression plus rapides.
4. La maternité, un tournant dans la carrière des femmes
L’arrivée d’un enfant constitue une rupture majeure dans la carrière des femmes, bien plus que pour les hommes.
Un impact direct sur l’emploi : 40 % des femmes diminuent leur temps de travail après la naissance d’un enfant, contre seulement 5 % des hommes. Le recours au temps partiel est une conséquence directe des difficultés à concilier vie professionnelle et familiale, ce qui réduit mécaniquement les perspectives d’évolution et les droits à la retraite.
Un risque accru de discriminations : Certaines entreprises hésitent à recruter ou à promouvoir des femmes en âge d’avoir des enfants, de peur qu’elles prennent un congé maternité ou réduisent leur disponibilité.
Un retour au travail plus difficile : Après un congé maternité, de nombreuses femmes constatent une stagnation de leur carrière, voire une rétrogradation implicite en raison de leur absence.
5. La retraite, dernier maillon des inégalités
Les inégalités salariales et les carrières plus hachées ont une conséquence directe sur les pensions de retraite. En moyenne, la pension de retraite des femmes est inférieure de 40 % à celle des hommes, notamment en raison des périodes d’interruption (maternité, temps partiel, congés parentaux).
Conclusion : un marché du travail encore largement inégalitaire
Le rapport de la Cour des comptes met en évidence que les inégalités de genre entre les femmes et les hommes ne sont pas simplement le fruit de choix individuels, mais le résultat de mécanismes systémiques qui s’enclenchent dès l’éducation et se renforcent tout au long de la vie professionnelle. L’accès à l’emploi, la rémunération, l’évolution de carrière et même la retraite sont marqués par un traitement différencié des femmes et des hommes, qui nécessiterait des politiques publiques plus ambitieuses et mieux coordonnées pour espérer une égalité réelle.
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